Gâteau de riz nostalgie

Justement Pa m’écrivait ce matin que la mémoire est une fonction étrange, les souvenirs vont et viennent à un rythme qui leur est propre et souvent sans rapport direct avec le présent, les évènements ni même les préoccupations.

C’est en léchant la cuillère de la casserole du riz cuit dans le lait que j’ai retrouvé ce goût bien particulier de mon enfance. Bien sûr, il n’y a aucune chance que j’aie fait la recette que Mam faisait à l’époque, surtout qu’elle devait en changer au rythme de ce qu’elle avait, et encore moins de chance que j’aie reproduit par hasard le goût exact que ce riz avait, mais il y avait quelque chose… Je ne sais pas si c’est l’influx nerveux qui allait à contre-courant du cerveau aux papilles gustatives ou si c’est la texture, ou encore simplement l’odeur de la vanille et du caramel mélangés, ou bien l’expectative si longtemps repoussée de ce dessert.

Je suis comme un saumon qui se rapproche de la côte à la recherche de sa rivière natale recherchant l’odeur bien particulière de ce lit de gravier dans lequel il est né.

Il a navigué dans bien des océans allant des côtes asiatiques et leurs saveurs exotiques à la méditerranée et ses parfums sucrés, passant par le Mexique aux explosions pimentées ou l’Afrique aux goûts inconnus. Il s’est rapproché des côtes, humant les effluves à la recherche de la molécule qui lui rappellera sa période juvénile. Finalement, il accroche un élément de réponse, puis reconnaît le flux, trouve la source et remonte le courant invisible de sa propre vie. Ce n’est pas exactement ce qu’il a connu. C’était il y a seulement trois ans et les goûts d’épinette sont plus soutenus, le vent a dû souffler plus fort et déloger plus d’épines. Il y a un fond de terre, la pluie a ruisselé plus vite. D’autres amertumes inconnues se sont ajoutées. Depuis le temps qu’il vit dans l’eau salée, son goût s’est altéré. Il ne saurait plus détecter, à quelques pas, l’odeur ténue d’une larve cachée sous une pierre. Il ne trouvera plus à 50 pas, l’odeur de la source fraîche qui sourd au fond de l’eau.

Mais il sait que c’est là.

Il ne retrouve plus la pierre où il se protégeait du courant. Ou il la retrouve, mais elle n’est plus de taille à l’aider. Il a grossi, tout est différent. Il ne retrouve plus le petit courant dans lequel il s’entraînait à sauter. Il a vieilli; tout paraît moins bien.

Moi, j’ai reconnu le plat! Oui, nous avons pratiquement le même moule qu’il y  avait chez moi. Je me souviens très bien de sa forme, de sa couleur, de ses anses en forme de coquillage.

J’ai retrouvé le goût quand je léchais le plat. Je ne l’ai pas retrouvé aussi pleinement quand j’ai mangé le dessert, mais ce n’est pas grave ça fait du bien.

À table!

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